La justice espagnole a annoncé ce mardi 28 juin l'ouverture d'une enquête sur la mort d'au moins 23 personnes lors de la tentative de quelque 2 000 migrants africains de pénétrer dans l'enclave espagnole de Melilla au Maroc, le 24 juin dernier. Un incident pour lequel l'ONU a dénoncé un « usage excessif de la force ».

Après celle du royaume chérifien, la justice espagnole se saisit à son tour du drame survenu à Melilla, où une vingtaine de personnes ont trouvé la mort vendredi 24 juin en tentant de pénétrer dans l'enclave espagnole. Le ministère public a annoncé ce mardi 28 juin avoir « demandé l'ouverture d'une enquête pour faire la lumière sur ce qu'il s'est passé », quelques heures après que l'ONU a exigé une enquête indépendante sur ce drame, le plus meurtrier jamais enregistré aux frontières entre le Maroc et les deux enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla, les seules frontières de l'UE sur le continent africain.

Au moins 23 migrants ont péri tandis que 76 autres ont été blessés ainsi que 140 policiers, selon les autorités marocaines, lorsque quelque 2 000 migrants ont tenté de franchir la haute clôture grillagée séparant Melilla de la ville frontalière marocaine de Nador. Le parquet espagnol a motivé sa décision par « la gravité des faits survenus, qui pourraient affecter les droits humains et les droits fondamentaux des personnes ».

PEDRO SANCHEZ S’ENGAGE À COLLABORER

Ce mercredi 29 juin, le Premier ministre espagnol Pedro Sánchez a promis une « collaboration totale » de son gouvernement avec les enquêtes sur la mort de ces migrants africains. « Je déplore la perte en vies humaines », a déclaré le chef du gouvernement dans une interview à la radio Cadena Ser, mettant de nouveau en avant « le droit de Ceuta et Melilla », les deux enclaves espagnoles en territoire marocain, « à des frontières sûre » et accusant « les mafias (...) qui se livrent au trafic d'êtres humains ».

Pour sa part, l'ONU a appelé les deux pays à garantir la tenue « d'une enquête efficace et indépendante »« L'usage excessif de la force est inacceptable », a estimé le porte-parole de l'ONU, Stéphane Dujarric. « Nous avons été choqués par la violence à la frontière entre Nador et Melilla vendredi et qui a entraîné la mort de dizaines de migrants et de demandeurs d'asile lors d'une tentative de traversée du Maroc en Espagne » a déploré Stéphane Dujarric. « Les droits humains des personnes qui migrent, y compris celui de demander asile, doivent être entièrement respectés », a-t-il insisté.

LE MAROC ACCUSE L'ALGÉRIE

À Rabat, une cinquantaine de migrants ont manifesté ce mardi 28 juin devant le bureau du Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR) à Rabat contre le traitement « inhumain » infligé par les forces de l'ordre marocaines vendredi et pour réclamer le statut de réfugiés. « À Nador, nous avons été battus d'une manière inhumaine », a déclaré à l'AFP Omar, un migrant soudanais qui a fui « la guerre et la prison » dans son pays. « Nous ne nous sentons pas en sécurité ici, nos vies sont en danger », a-t-il ajouté.

La majorité des nouveaux migrants qui affluent au Maroc viennent du Soudan, en particulier du Darfour, où une nouvelle flambée de violence a récemment fait des centaines de morts et 50 000 déplacés. Beaucoup passent par la Libye et l'Algérie – malgré une frontière officiellement fermée avec le Maroc – pour arriver dans le royaume chérifien.

En pleine crise avec l'Algérie, le Maroc a pointé du doigt la responsabilité de sa voisine dans la tragédie de Melilla, selon un communiqué de l'ambassade du royaume en Espagne obtenu par l'AFP. « Les assaillants sont entrés par la frontière avec l'Algérie, profitant du laxisme délibéré du pays dans le contrôle de ses frontières avec le Maroc », a accusé la diplomatie marocaine. Un communiqué qualifié de « fuite en avant » par le diplomate algérien chargé de la question du Sahara-occidental, Amar Belani, qui a accusé Rabat de chercher « des boucs émissaires pour se défausser de ses responsabilités », sur le site d'information algérien TSA.

S/M/Africsol

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