Un face-à-face qui sent le soufre. Invité de « Vous avez la parole » jeudi soir sur France 2, Gérald Darmanin débattra avec Marine Le Pen. Le ministre de l’Intérieur et la présidente du Rassemblement national échangeront notamment sur le projet de loi sur les « séparatismes », actuellement examiné à l’Assemblée nationale. Le débat « permettra de démontrer nos divergences fondamentales », a indiqué Marine Le Pen dans un entretien à 20 Minutes jeudi dernier. « Gérald Darmanin doit répondre des résultats de son ministère : l’immigration, l’insécurité, l’islamisme. »
La candidate à la présidentielle torpille depuis plusieurs semaines le texte du gouvernement. Le ministre de l’Intérieur dit, pour sa part, vouloir « combattre » le parti à la flamme, en espérant récupérer une partie de son électorat.
« Un moment important », assure l’entourage du ministre
Pour Gérald Darmanin, le débat est crucial car il s’est personnellement investi sur ce texte. Francis Chouat, député d’Essonne apparenté LREM, n’a donc aucun doute avant cette confrontation. « Il a énormément travaillé sur cette loi. Et ses actes au ministère de l’Intérieur parlent pour lui, notamment après la terrible décapitation de Samuel Paty, avec les dissolutions de ces prétendues associations que sont Barakacity ou le CCIF », salue ce proche de Manuel Valls. « Sur ces sujets, il ne faut surtout pas laisser l’occasion aux extrémistes de rendre le débat confus ou dangereux, en laissant croire que l’on viserait l’islam », précise-t-il.
Dans l’entourage de Gérald Darmanin, on estime d’ailleurs que la confrontation de jeudi est « un moment important » dans la séquence médiatique. « Cela permettra de montrer aux Français nos solutions contre l’islamisme. Des solutions républicaines, fortes, courageuses, mais qui ne font pas fi de l’Etat de droit », assure-t-on, visant en creux celles proposées par Marine Le Pen.
« Monsieur Darmanin a du souci à se faire »
Car la présidente du RN a récemment présenté son propre projet de loi pour lutter contre l’islamisme. Dans la perspective de la présidentielle, l’émission est aussi l’occasion de montrer sa crédibilité sur ses sujets de prédilection, après le débat raté de l’entre-deux tours en 2017, face à Emmanuel Macron. Même si l’intéressée réfute un tel enjeu auprès de 20 Minutes. « C’est tout à fait incomparable. Il s’agit là d’un débat avec un des ministres du gouvernement, j’ai d’ailleurs déjà débattu avec Monsieur Darmanin », balaie-t-elle, en évoquant la joute dans cette même émission en octobre 2017.
Au RN, on indique vouloir montrer aux Français « les insuffisances » des mesures de l’exécutif. « Plutôt que de combattre le RN, le ministre devrait utiliser son énergie pour combattre le fléau islamiste, ce que ne fait pas sa loi », dénonce ainsi Gilles Pennelle, membre du bureau national du parti et candidat en Bretagne pour les prochaines régionales.
« Monsieur Darmanin a du souci à se faire car Marine Le Pen va démontrer que son texte n’est pas adapté à la menace, ajoute-t-il. Elle pointera également les échecs du ministre sur l’insécurité et l’immigration, bien loin des rodomontades médiatiques de ses débuts. Cela n’est donc pas étonnant de le voir depuis quelques jours sur la défensive. »
Tensions à l’approche du débat
Car le ton est déjà monté d’un cran, dans les médias ou à l’Assemblée nationale, entre les deux protagonistes. Le 25 janvier, Gérald Darmanin fustige dans le Parisien « l’escroquerie intellectuelle » de Marine Le Pen, lui reprochant son manque d’implication en commission spéciale et son refus de voter la loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme (Silt) en octobre 2017. Face aux critiques de la députée du Pas-de-Calais, mercredi dernier, dans l’hémicycle, le ministre a renouvelé ses attaques. « On pensait que vous étiez dans un monde de construction pour la présidentielle, en fait, vous restez assez fidèle au débat de l’entre-deux tour [de 2017] », a taclé le locataire de la place Beauvau, dénonçant le « grand méchant flou » des propositions du RN.
Marine Le Pen a répondu aux critiques du ministre auprès de 20 Minutes. « Il faudrait qu’il aborde ce débat avec un peu plus de calme car, depuis quelques jours, je le trouve très excessif et agacé. Le mieux, c’est que le débat se déroule dans des conditions républicaines. »
S/20M/AFRICSOL
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