La macronie faisait bloc jeudi autour d'un de ses piliers, Richard Ferrand, dont la mise en examen pose la question de son maintien à la présidence de l'Assemblée nationale.
M. Ferrand, qui a reçu le soutien du président Emmanuel Macron, est "combatif" et "au travail" à l'Hôtel de Lassay, a indiqué son entourage à l'AFP.
Le chef de l'Etat lui maintient "toute sa confiance", avait déclaré la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye, dès le début de matinée.
C'est "un homme loyal, droit, qui a un parcours politique exemplaire", a-t-elle insisté en demandant de respecter "la présomption d'innocence".
Selon une source proche du dossier, le président de l'Assemblée nationale a reçu dans la nuit des coups de fil de soutien du président de la République puis du Premier ministre Edouard Philippe, dans la voiture qui le ramenait de Lille.
Il venait d'être mis en examen par un juge de la capitale des Hauts-de-France, après près de quinze heures d'interrogatoire.
M. Ferrand est soupçonné de "prise illégale d'intérêts" après que les Mutuelles de Bretagne, qu'il dirigeait à l'époque, ont décidé en 2011 de louer des locaux commerciaux appartenant à sa compagne. Il conteste toute irrégularité.
Cette procédure portée par l'association Anticor, partie civile, reprend le fil d'une première enquête lancée en juin 2017, après des révélations du Canard enchaîné qui avaient poussé M. Ferrand à quitter le gouvernement après un mois à peine. Elle avait été classée sans suite par le procureur de Brest en octobre suivant. Le parquet avait invoqué la prescription pour la prise illégale d'intérêts, et jugé que les infractions d'abus de confiance et d'escroquerie n'étaient pas constituées.
La mise en examen d'un président de l'Assemblée nationale en cours d'exercice est une première. M. Ferrand y a réagi aussitôt en se disant "déterminé à poursuivre (sa) mission". Il a également assuré "rester serein sur l'issue de la procédure, au regard du classement sans suite de l'ensemble des griefs de la première plainte (...), d'autant plus qu'aucun élément nouveau n’a été versé à ce dossier dans lequel il n’y a ni préjudice ni victime".
"Il n'y a pas de logique politique" à ce qu'il démissionne, a plaidé Sibeth Nidaye, car "un membre du gouvernement est nommé, un parlementaire est élu; quand on est président de l'Assemblée nationale, on est élu deux fois". Un argument repris à peu près tel quel par plusieurs ministres.
- Pilier de la campagne -
L'autre angle de riposte de la majorité est de souligner la présomption d'innocence. Ainsi de Stanislas Guerini, patron du parti présidentiel LREM: "Gardons-nous de confondre instruction et condamnation". "Il faut respecter la démocratie et ne pas tout confondre", a ajouté la secrétaire d'Etat Marlène Schiappa.
Dans l'opposition, le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure et le président de Debout la France Nicolas Dupont-Aignan ont appelé à sa démission, contrairement à plusieurs responsables du Rassemblement national.
Christian Jacob, candidat à la présidence du parti Les Républicains, a souligné aussi qu'une "mise en examen ne vaut pas condamnation". C'était pour mieux réserver ses flèches à Emmanuel Macron, jugeant "déplacé" le soutien affiché du chef de l'Etat.
La mise en examen de Richard Ferrand est un coup dur pour la majorité, dont trois autres poids lourds, -François Bayrou, Marielle de Sarnez et la nouvelle commissaire européenne Sylvie Goulard- ont été entendus mardi et mercredi dans l'affaire des emplois présumés fictifs des assistants parlementaires MoDem.
En serrant pour l'heure les rangs autour de Richard Ferrand, la macronie veut protéger l'un de ceux qui étaient là au tout début de l'aventure présidentielle d'Emmanuel Macron, et qui conserve un rôle de conseiller éminent.
Cet élu du Finistère âgé de 57 ans, député socialiste de 2012 à 2017, est relativement peu connu du grand public malgré son rang de 4e personnage de l'Etat. Mais il est "le mec le plus important chez les politiques auprès d'Emmanuel", "le plus fin et le plus libre", affirmait ces derniers jours à l'AFP un marcheur de la première heure.
S/AFP/AFRICSOL
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