La France est soumise à un confinement historique pour faire la "guerre" au coronavirus, et le Parlement doit voter jeudi et vendredi "l'état d'urgence sanitaire" alors que le nombre de malades augmente de façon exponentielle.
Face à une "crise sans précédent", dans un pays quasiment à l'arrêt, le gouvernement a autorisé mercredi l'instauration d'un "état d'urgence sanitaire", accompagné de mesures d'urgence pour soutenir l'économie.
Il sera déclaré par décret après l'adoption du projet de loi. L'Assemblée nationale et le Sénat seront informés "sans délai" des mesures prises pendant cette période.
Le coronavirus se propage de plus en plus rapidement et le bilan des victimes s'est alourdi mercredi, au deuxième jour du confinement ordonné par le gouvernement, avec un risque de saturation de services d'urgence.
Les hôpitaux accueillent désormais 3.626 patients dont 931 sont en réanimation. Parmi ces cas les plus graves, la moitié sont âgés de "moins de 60 ans", a insisté le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon en annonçant un total de 264 décès (89 supplémentaires en 24 h).
- "Pas de place pour eux" -
Outre la situation difficile dans le Grand Est, le tableau se tend également en Ile-de-France.
L'état des lieux est déjà dramatique dans les Ehpad, a alerté Gaël Durel, président de l’Association des médecins coordinateurs et du secteur médico-social: "Lorsque le virus rentre dans (un) établissement, on assiste à des taux de 75% de résidents atteints par le virus et des taux mortalité catastrophiques, au-delà de 20 à 30%" a-t-il dit sur RTL.
"Il n'y a pas de place pour eux à l'hôpital, ils sont trop vulnérables (...) on va privilégier, ce qui est tout à fait compréhensible, des personnes qui ont plus de chance de pouvoir s'en sortir".
Une situation qu'a connue l'Italie, entrée en confinement depuis près de deux semaines.
C'est d'ailleurs la crainte des experts d'une saturation des urgences qui a conduit le chef de l’Etat Emmanuel Macron à annoncer lundi de strictes mesures de confinement pour "au moins 15 jours".
- Plus de 4.000 amendes -
Cent mille membres des forces de l'ordre ont été déployés, infligeant une amende forfaitaire de 135 euros en cas "violation des interdictions de se déplacer hors de son domicile". En 24 heures, 4.095 amendes ont été dressées, selon le ministre de l'Intérieur.
Le gouvernement a reconnu des "difficultés logistiques" dans la fourniture de masques, alloués "en priorité aux soignants", qui s'alarment pourtant de leur dénuement. La ministre Florence Parly a annoncé que 5 millions de masques chirurgicaux des Armées avaient été mis à disposition du ministère de la Santé.
Selon le Pr Salomon, un total de 25 millions de masques sont en cours de livraison aux pharmacies et établissements de soins.
- "Merci!" -
Consciente du rôle vital qu'ils jouent, la population a témoigné son soutien et son respect aux personnels de santé, en première ligne face à l'épidémie: à 20H00, à Paris et en régions, des salves d'applaudissements ont retenti: sifflements et "Merci!" ont notamment été entendus dans les rues de Mulhouse, particulièrement frappée.
Le premier transfert aérien de six malades a d'ailleurs eu lieu de l'Alsace vers des hôpitaux militaires de Toulon et Marseille. Le déploiement d'un hôpital militaire est également programmé en Alsace.
Le gouvernement va par ailleurs mettre en place un dispositif aérien, en lien avec Air France, pour permettre aux Français bloqués à l'étranger en raison de la pandémie de rentrer chez eux, ont annoncé mercredi soir trois ministres.
- Droit de retrait -
Les inquiétudes sur le fonctionnement même du pays montent, malgré les assurances du gouvernement, qui a examiné mercredi des dispositions pour restreindre certaines libertés ou ordonner des réquisitions.
Il pourra prendre par ordonnances des mesures pour soutenir les entreprises et limiter les licenciements.
Le gouvernement a d'ailleurs appelé les employés des secteurs essentiels à continuer de travailler. "Il faut bien que nous puissions nous nourrir, que les familles françaises puissent se rendre dans les magasins de la grande distribution et acheter des produits alimentaires", selon le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire.
Le président délégué du Medef, Patrick Martin, a alerté sur un arrêt possible de l'activité économique, y compris dans les secteurs essentiels, en raison d'un "changement d'attitude brutal" des salariés, prêts à faire jouer leur droit de retrait après l'instauration des mesures sanitaires.
Les caissiers notamment s'alarment : des photos circulaient sur les réseaux sociaux montrant des caisses de magasins d'alimentation protégées par de simples films plastiques étirés au niveau des visages.
Olivier Véran a annoncé que le gouvernement serait amené à fermer certains marchés "où l'on voit des foules" ou "qui ont beaucoup d'étals", pour éviter les rassemblements.
Certaines régions ont pris des mesures face à l'afflux de citadins venus se confiner dans des résidences secondaires: locations interdites dans les îles du Morbihan, plages et sports nautiques à Oléron: "On est en confinement, pas en vacances", tempête le président des communes de l'île.
S/AFP/AFRICSOL
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