Emmanuel Macron est attendu mardi à Mulhouse pour annoncer de premières mesures de lutte contre le "séparatisme islamiste", un dossier politiquement sensible à l'approche des élections municipales.

Le chef de l'Etat va passer huit heures à Bourtzwiller, quartier sensible de la ville du Haut-Rhin, "où la République doit réaffirmer sa présence" face à l'insécurité, les trafics ou le radicalisme, selon son entourage.

Cette "visite de terrain" est la première étape d'une séquence qui s'étendra au delà des élections municipales des 15 et 22 mars, durant laquelle le chef de l'Etat détaillera la stratégie du gouvernement contre la radicalisation et l'islam politique. Soit "le séparatisme islamiste", une dénomination jugée plus précise que celle de "communautarisme", longtemps employée par l'Elysée.

"Il faut essayer de dire sans diviser. Il faut accepter, en disant, de parfois bousculer. Mais il faut accepter qu'il y a, dans notre République aujourd'hui, ce que j'appellerais un séparatisme", a détaillé le chef de l'Etat en janvier.

Depuis le début du quinquennat, les oppositions, notamment de droite, pressent Emmanuel Macron d'affirmer sa politique sur ce sujet, le taxant de laxisme. Le débat s'est encore durci ces derniers mois, alimenté par de vives polémiques sur la présence de listes communautaristes aux municipales ou sur le port du voile par une mère accompagnant une sortie scolaire.

En réaction à cette affaire, en octobre 2019, Emmanuel Macron a appelé à "être intraitable avec le communautarisme", mais sans" stigmatiser nos concitoyens" musulmans. Il a aussi dénoncé le "raccourci fatal" entre lutte contre le terrorisme et islam.

- "Reconquête républicaine" -

A Bourtzwiller, le chef de l'Etat débutera sa visite par le commissariat de police pour faire le point de la situation avec les forces de l'ordre.

Ce quartier peuplé de plus de 15.000 habitants est l'un des 47 "Quartiers de reconquête républicaine" (QRR) de France, un dispositif créé en 2018 pour lutter contre la délinquance et les trafics, notamment par le renforcement du nombre de policiers.

Il est également l'un des 17 territoires de lutte contre la radicalisation, définis depuis quelques mois, où sont mises en place des cellules contre l'islamisme et le repli communautaire (Clir) dont le chef de l'Etat souhaite renforcer l'action.

Accompagné de quatre ministres - Christophe Castaner et Laurent Nuñez (Intérieur), Gabriel Attal (Jeunesse) et Roxana Maracineanu (Sports) - Emmanuel Macron devrait s'exprimer sur le financement des lieux de culte, notamment depuis l'étranger, la scolarisation d'enfants dans des écoles hors-contrat et la structuration de l'islam de France.

Pourrait ainsi être évoqué le dossier de l'immense mosquée An-Nour en cours de construction à Mulhouse grâce en large partie à des financements d'une ONG du Qatar.

Emmanuel Macron consacrera la seconde partie de son déplacement au volet "positif" de sa stratégie, à savoir la "reconquête républicaine" des quartiers basée sur des services publics plus présents et efficaces et sur le réseau associatif, dont la vitalité est indispensable pour éviter que les habitants, notamment les jeunes, ne soient tentés par les circuits parallèles. Au cours d'une table-ronde, il échangera ainsi avec des associations sociales, cultuelles ou culturelles avant de rencontrer des responsables sportifs.

Le chef de l'Etat ne devrait en revanche pas s'aventurer sur les dossiers très sensibles de la laïcité et du port du voile ou sur une réforme de l'organisation de l'islam de France, actuellement à l'étude.

Sans être la priorité des électeurs sur l'ensemble du territoire, le communautarisme est l'un des enjeux des municipales dans certaines villes, notamment en région parisienne. Bruno Retailleau, le président du groupe LR au Sénat a proposé dimanche "la mise sous tutelle républicaine" des communes dirigées par des élus "complices des islamistes".

Ian Brossat, porte-parole du PCF, a, lui, accusé lundi Emmanuel Macron de "détourner le débat", par "tactique politique", en mettant en avant la lutte contre le communautarisme en pleine campagne électorale.

S/AFP/AFRICSOL

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