Alors que le dépouillement commence, les opposants au président Roch Marc Christian Kaboré qui se représente crient déjà à la fraude.
L’opposition burkinabée a une nouvelle fois accusé lundi 23 novembre le pouvoir du président Roch Marc Christian Kaboré, favori du scrutin, de « fraudes » lors de la présidentielle de dimanche, alors que la Commission électorale nationale indépendante (CENI) a à peine commencé à donner les premiers résultats. En fin de journée, la CENI, qui dispose d’une semaine pour annoncer le résultat, n’avait divulgué les résultats que d’une quinzaine de communes sur 366.
Dimanche soir, son président Newton Ahmed Barry avait reconnu que « autour de 300 000 à 350 000 » personnes sur les 6,5 millions d’électeurs n’avaient pas pu voter en raison des menaces sécuritaires, notamment dans l’est et dans le nord du pays.
Pays sahélien parmi les plus pauvres du monde, le Burkina Faso vit ses heures les plus sombres depuis son indépendance de la France en 1960, s’enfonçant depuis cinq ans dans une spirale de violences djihadistes et intercommunautaires, associées à une répression souvent violente des forces de sécurité.
Les attaques des groupes djihadistes – certains affiliés à Al-Qaida, d’autres à l’organisation Etat islamique – ont fait au moins 1 200 morts et chassé de leurs foyers un million de personnes, qui s’agglutinent dans les grandes villes.
« Des résultats entachés d’irrégularités »
Cela ne devrait toutefois pas empêcher la validation des résultats, l’Assemblée nationale ayant adopté en août une modification du code électoral afin que les élections soient valables, même si elles ne peuvent pas avoir lieu sur l’ensemble du territoire.
Le nouveau code précise qu’« en cas de force majeure ou de circonstance exceptionnelle (…) entraînant l’impossibilité d’organiser les élections sur une partie du territoire national, l’élection est validée sur la base de la partie non affectée par la force majeure ».
Elu en 2015, le président Roch Marc Christian Kaboré, qui brigue un second mandat, est favori face à douze adversaires, dont Zéphirin Diabré, chef de file de l’opposition, et Eddie Komboïgo, candidat du parti de l’ancien président Blaise Compaoré, dont le régime tombé il y a six ans fait l’objet d’une nostalgie croissante.
Après ses accusations de samedi, l’opposition a une nouvelle fois estimé lundi que le double scrutin présidentiel et législatif était « émaillé de fraudes », réitérant sa menace de ne pas accepter des « résultats entachés d’irrégularités ».
L’opposition « émet de très fortes réserves sur la sincérité et la crédibilité des résultats », a déclaré au nom de l’opposition Tahirou Barry, l’un des candidats à la présidentielle, lors d’une conférence de presse à Ouagadougou.
Une victoire dès le premier tour ?
« En tout état de cause, les signataires de l’accord politique [de l’opposition] n’accepteront pas des résultats entachés d’irrégularités et qui ne reflètent pas la volonté du peuple burkinabé », a ajouté M. Barry, qui s’exprimait aux côtés de cinq autres candidats à la présidentielle dont MM. Diabré et Komboïgo.
Le clan présidentiel a promis, comme en 2015, une victoire au premier tour de ce scrutin considéré comme le plus ouvert de l’histoire du Burkina qui a connu de multiples coups d’Etat depuis son indépendance.
Sans exhiber de preuves, l’opposition burkinabée avait déjà affirmé samedi qu’une « fraude massive » était en préparation, menaçant dans les mêmes termes de ne pas reconnaître « des résultats entachés d’irrégularité ». « Il est absolument inconcevable après avoir parcouru tout le Burkina Faso de penser avoir un parti gagnant dès le premier tour », avait notamment indiqué M. Diabré.
Une victoire dès le premier tour permettrait à Roch Kaboré d’éviter un second tour contre un candidat soutenu par l’ensemble de l’opposition.
Dimanche, les Burkinabés faisaient, eux, surtout état de leur inquiétude quant à la situation sécuritaire : « On attend beaucoup de la sécurité. On sait que ce n’est pas facile, mais on aimerait qu’il y ait la paix, qu’il y ait le pardon entre les Burkinabés et que l’on puisse vivre ensemble tranquille », disait ainsi Abdoulaye Koula, électeur à Ouagadougou.
S/LMA /AVEC AFP/AFRICSOL
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