Impressionnante d'aisance, la Jamaïcaine Shelly-Ann Fraser-Pryce a effectué un retour fracassant au sommet du sprint en survolant le 100 m des Mondiaux de Doha, dimanche, deux ans après avoir donné naissance à son fils Zion.
L'athlète de poche (1,60 m), toute en muscles et en puissance, a relancé avec éclat une carrière mise en sommeil pour cause de maternité. Pour son premier grand championnat depuis les Jeux Olympiques de 2016 à Rio, Fraser-Pryce n'a pas fait dans la demi-mesure avec un chrono époustouflant (10 sec 71, meilleure performance mondiale 2019 à 1 centième de son record personnel), s'offrant un 4e titre mondial sur la ligne droite, son 8e au total, auxquels il faut bien sûr ajouter ses deux couronnes aux JO-2008 et 2012.
Devant les tribunes clairsemées du Khalifa stadium, comme la veille pour le sacre de l'Américain Christian Coleman sur 100 m, la coureuse de Kingston avait une grosse concurrence à mater avec la Britannique Dina Asher-Smith, triple médaillée d'or européenne en 2018 à la foulée diabolique. Mais Fraser-Pryce, arrivée au Qatar avec le temps le plus rapide de 2019 (10 sec 73), était quasiment en mission et ce n'est pas le manque d'ambiance qui pouvait la désarçonner.
Auteur d'un départ supersonique, la Jamaïcaine n'a jamais été inquiétée et Asher-Smith, 2e, été largement distancée malgré un record de Grande Bretagne battu en 10 sec 83. L'Ivoirienne Marie-Josée Ta Lou a complété le podium (10 sec 90).
Voilà désormais Fraser-Pryce nantie d'un palmarès long comme le bras à 32 ans, de quoi justifier son surnom de "Bolt au féminin". Seule ombre au tableau, sa suspension de six mois pour dopage à l'oxycodone (opioïde) en 2010. Mais celle qui est propriétaire d'un salon de coiffure et aime soigner son look avec des cheveux décolorés a su se refaire une virginité, au prix d'une extraordinaire longévité. Comme un symbole, une fois son succès assuré, elle s'est offert un tour d'honneur avec son fils dans les bras devant des gradins déjà vidés.
"Être de nouveau championne du monde après la naissance de mon bébé, je ne peux être que ravie, a déclaré Fraser-Pryce. Physiquement, ça a été un long parcours pour revenir au plus haut niveau, il m'a fallu beaucoup de travail et de sacrifice."
- Deux concours de folie -
Si le public a une nouvelle fois fait défaut, terrible rengaine de ces Mondiaux, la soirée a été parfaite avec également deux très beaux concours. Au triple saut, le duel tant attendu entre les deux Américains Christian Taylor et Will Claye a tenu toutes ses promesses. Poussé dans ses retranchements par son vieux complice et rival et au bord de l'élimination après deux essais mordus, Taylor (17,92 m) a tout de même fini par avoir le dernier mot, comme d'habitude, ajoutant un 4e titre mondial à sa collection.
Le suspense a aussi été entier à la perche dames remportée par Anzhelika Sidorova. La Russe, qui concourt sous bannière neutre en raison de la suspension de son pays depuis 2015 après la révélation d'un vaste scandale de dopage institutionnel, a été au coude-à-coude avec l'Américaine Sandi Morris mais a raflé la mise en franchissant 4,95 m à son dernier essai, soit le meilleur saut de l'année.
Cruel dénouement pour Morris, qui échoue de nouveau à la 2e place d'une grande compétition en plein air après avoir été longtemps dans l'ombre de la championne olympique grecque Ekaterini Stefanidi, seulement 3e (4,85 m).
Côté français, les jours se suivent et se ressemblent. Après le fiasco de samedi et les échecs de Renaud Lavillenie (perche), Yohann Diniz (50 km marche), Jimmy Vicaut (100 m), Alexandra Tavernier (marteau) et Rénelle Lamote (800 m), c'est cette fois Pierre-Ambroise Bosse qui a mordu la poussière.
Le tenant du titre du 800 m n'avait de toutes façons pas beaucoup de certitudes et abordait ces Mondiaux sans grandes références cette saison. Il n'a pas réussi à se surpasser et s'est vu refermer les portes de la finale avec une dernière place dans sa demi-finale. Pour les Bleus, il ne reste plus que Kevin Mayer (décathlon) et les deux hurdleurs Pascal Martinot-Lagarde et Wilhem Belocian (110 m haies) sur qui compter pour éviter un bilan famélique.
S/AFP/Africsol
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