Elle tenait à parachever son exaltant périple abreuvé de clichés et de sonorités uniques par l’Afrique de l’ouest. C’est désormais chose faite. Début février, à la faveur d’une exposition déclinée en quatre étapes et portée par La Pépinière culturelle, l’association de droit français qu’elle préside, Mélanie Abot est allée au contact de citoyens ouest-africains. De Bobo-Dioulasso en passant par Bamako, Diembering en Casamance ou encore Toubab Dialaw à 55 km de Dakar, l’attachante porteuse de projet a défendu à bout de toiles les valeurs d’interculturalité et de brassage des peuples.
Aux origines d’un projet interculturel à forte valeur ajoutée
Quand elle décolle fin janvier de l’aéroport Saint-Exupéry de Lyon en France pour le Burkina Faso, Mélanie Abot n’a qu’une seule obsession: retrouver un continent, avec lui sa joie de vivre, son intarissable créativité, le dynamisme et l’humanité de ses femmes, et de ses jeunes. L’Afrique, en effet, n’est pas une destination étrangère à la présidente de l’association La Pépinière culturelle. Mélanie a découvert le continent africain en 2004 à l’occasion d’un stage de deux mois à Yaoundé, la capitale camerounaise, pour le compte d’une association française de solidarité internationale. Depuis, le lien fusionnel avec l’Afrique s’est affirmé davantage avec une avalanche de missions et de voyages : Rufisque au Sénégal, le Tassili du Hoggar à la frontière entre l’Algérie et le Niger, le désert de l’Ennedi au Tchad, l’Ethiopie et le Cap-Vert. En 2014, naît le projet Afrique[S] qui résume en photos inédites et éléments sonores dix fructueuses années sur le continent. Dans la foulée, se crée également l’association La Pépinière culturelle. Véritable creuset de projets d’économie sociale et solidaire, l’association de solidarité internationale se singularise par sa démarche interculturelle qui favorise une mutualisation des compétences, des réseaux et des connaissances de chaque membre.
Finir en beauté un projet outil d’expression citoyenne
Après plus d’une quinzaine d’étapes déjà réalisées, les nouvelles expositions n’ont rien d’une routine pour Mélanie et les équipes de bénévoles mobilisées sur place. Elle débarque à Bobo-Dioulasso, deuxième ville du Burkina Faso, avec 22 panneaux en tissu voile de bateau d’un mètre de large sur deux mètres de long. Ces panneaux sont la charpente d’une exposition agrémentée par une balade sonore sous casque d’une vingtaine de minutes. Le participant à ce carnet de voyage peut écouter des chants traditionnels et les voix off de Mélanie et de citoyens africains échangeant à bâtons rompus. Autour de ces toiles géantes, d’un casque qui distille des chants et des voix et d’une enceinte sonore qui feutre l’ambiance musicale, s’instaure une plateforme d’échanges avec les visiteurs. Des thématiques liées à la culture, à l’éducation, à l’agriculture et aux groupements d’intérêts économiques, à la place et au rôle de la femme, à la violence, au genre sont alors débattues. Une exposition qui a vocation à être un outil d’expression citoyenne, un support accessible d’interculturalité mobilisant les communautés visitées.
Des étapes de projet vivier de riches expériences humaines
A Bobo-Dioulasso, l’exposition a pris ses quartiers au centre culturel Les Bambous avec le soutien de l’association Nyogonben. Elèves, étudiants, artisans et citoyens ordinaires sont venus se plonger dans le reflet intérieur de photos qui parlent mieux qu’un récit. A Bamako, même engouement des visiteurs qui ont rallié un jardin public du quartier de Faladiè Sema. Agents du ministère malien de la culture, activistes d’association, passants curieux ne se sont pas faits prier pour prendre d’assaut le labyrinthe des panneaux, à la découverte de cette Afrique, leur Afrique, qu’ils n’ont pas finir de redécouvrir.Diembering, en Casamance, a été l’épicentre d’un bouillonnement communautaire à l’occasion de la troisième étape de l’exposition. Sous l’impulsion de Lamine Tamba, artiste-peintre sénégalais originaire de la Casamance, la mobilisation a été exceptionnelle durant les quatre jours d’exposition. Fait marquant sur le plan institutionnel, l'ensemble des acteurs locaux ont été associés au projet: les autorités locales et traditionnelles - le maire, le chef du village, le préfet de police et les brigades locales, les groupements féminins, les établissements scolaires, la radio communautaire régionale, le Centre culturel de Casamance et l’Alliance française à Ziguinchor. Tous les ingrédients ont donc été réunis pour une appropriation du projet. Une mobilisation, qui de l’aveu des habitants de Diembering, est historique d’autant plus qu’elle a permis de réunir 160 femmes en Assemblée générale. L’animation, les échanges et les débats se sont déroulés en Kwataye, langue locale. Les femmes ont également organisé la confection et la vente de repas ainsi que l’exposition d’objets traditionnels.
Ultime étape de l’exposition itinérante, Toubab Dialaw et son espace culturel Sobo Badè. Un espace qui se confond avec la vie du sculpteur et poète haïtien Gérard Chenet installé au Sénégal depuis 1967, à l’invitation de l’ancien président Léopold Sédar Senghor. Une itinérance de l’ancien journaliste haïtien qui n’est pas nous rappeler l’universalité des valeurs de partage, de solidarité, d’interculturalité et de décloisonnement qui sous-tendent la démarche opérationnelle de La pépinière culturelle.
Pour sûr au rendez-vous du donner et du recevoir si cher à Senghor, La Pépinière culturelle ne viendra pas les mains vides. Le rayonnement de ses actions au-delà de la Franche-Comté (région de l’Est de la France) l’aura précédé.
Fidèle GOULYZIA../AFRICSOL
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