DÉFENSE. Le principal problème posé à l’UE, d’après Josep Borrel, haut représentant pour les Affaires étrangères, est la présence de mercenaires russes de Wagner.
Une décision qui intervient après le massacre de Moura
Ce sont bien les événements qui se sont déroulés à Moura qui ont conduit l'UE à trancher. Forces armées maliennes (Famas) et supplétifs russes sont notamment accusés de très graves exactions à l'encontre de civils, fin mars, dans ce village du centre malien. Bamako a démenti ce massacre, assurant avoir neutralisé des djihadistes. Les autorités maliennes ont annoncé l'ouverture d'une enquête. La Russie en fin de semaine dernière a félicité Bamako pour son opération de neutralisation de djihadistes à Moura. La région de Moura est l'un des principaux foyers des violences sahéliennes. Les Nations unies ont annoncé avoir ouvert une enquête. Et les Européens réclament une enquête indépendante.
Au-delà de ces événements, cela faisait des mois que l'Union européenne s'interrogeait sur sa présence au Mali à travers les missions EUTM, surtout depuis l'annonce du retrait de troupes françaises et européennes de ce pays décidé en début d'année et toujours en cours. « La question est de savoir comment la Minusma va pouvoir continuer à travailler. Si c'est pour rester aveugle et sourde dans des casernes, ce n'est pas nécessaire de rester », a jugé Josep Borrell.
L'Allemagne s'interroge sur son engagement futur au Mali
Les militaires ont pris le pouvoir au Mali lors de deux coups d'État, en août 2020 puis en mai 2021. Le principal problème posé à l'UE est la présence de mercenaires du groupe russe Wagner, venus au Mali à l'appel de la junte, et la collaboration d'unités de l'armée malienne formées par l'UE à leurs activités. Bamako dément toute présence de mercenaires du groupe Wagner sur son sol, ne reconnaissant qu'une assistance d'« instructeurs russes » en application d'un accord de coopération bilatéral remontant aux années 1960. Plusieurs pays occidentaux ont critiqué au contraire le déploiement de plusieurs centaines de paramilitaires de Wagner au Mali en parallèle du départ des forces de Barkhane et de Takuba.
La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a prévu de rencontrer le chef de la junte malienne lors d'un déplacement cette semaine au Mali. Elle veut « se faire une idée précise de la situation politique et sécuritaire » en vue de décider du maintien ou non de la Bundeswehr, a expliqué un porte-parole du ministère. En effet, l'Allemagne envisage de retirer ses militaires présents au Mali dans le cadre de la mission de formation de l'UE et de la mission des Nations unies au Mali, la Minusma. Quelque 300 soldats allemands participent à la Mission de formation de l'Union européenne au Mali (EUTM), et 1100 soldats à la Minusma, qui compte 14 000 militaires et policiers.
L'UE a engagé plusieurs centaines de militaires et d'experts dans deux missions de formation au Mali, l'EUTM pour les forces armées et l'Eucap Sahel-Mali pour la police. Le mandat de l'Eucap, approuvé en 2015, a été prolongé au 31 janvier 2023. Celui de l'EUTM, depuis 2013, court jusqu'au 18 mai 2024.
Un précédent avec la Centrafrique
Le cas malien n'est pas isolé. En décembre dernier, le commandant de la mission de formation de l'UE en Centrafrique (EUTM-RCA) avait annoncé la suspension temporaire de la formation des militaires en Centrafrique en invoquant la mainmise de Wagner, sur les forces armées centrafricaines (Faca). Plusieurs centaines de paramilitaires russes qui ont mené une contre-offensive massive contre la rébellion depuis plus d'un an aux côtés de l'armée ont été accusés, notamment par l'ONU, de violation des droits humains, tout comme les soldats centrafricains et les rebelles. Comme pour la Centrafrique, la décision des 27 au Mali est « temporaire » et « réversible ».
S/LE POINT AFRIQUE/Africsol
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