- Le Real Madrid est assuré de remporter la Liga après sa victoire contre Villarreal, jeudi soir, lors de la 37e journée du championnat d'Espagne.
- Zidane renforce ainsi encore sa légende, avec 11 trophées remportés à la tête de cette équipe.
- Le Real de cette saison avait pourtant moins d'arguments à faire valoir que par le passé, mais le Français a su s'adapter aux circonstances.
Il va falloir apprendre à ne plus être surpris par Zinédine Zidane. Même si, vraiment, le bougre ne nous aide pas du tout. Après toutes ces années, celles où il a été un joueur de génie puis celles où il a amassé en une quarantaine de mois et 209 matchs plus de titres que 99 % des entraîneurs du monde dans leur carrière, il arrive toujours à nous avoir.
Le coach français a remporté la Liga jeudi soir, grâce à la victoire du Real Madrid contre Villarreal. Son onzième titre sur le banc merengue, sa deuxième couronne de champion d’Espagne, après celle de 2017, qui avait représenté « le plus beau jour de [sa] vie professionnelle ». Ce titre-là devrait avoir également une place toute particulière dans son Panthéon personnel. Parce qu’il porte son empreinte, très profondément.
Mais Zizou, qui a dû en plus se passer de Hazard une grande partie de la saison, s’est battu avec ses armes. « Zidane est quelqu’un d’extrêmement adaptable. Pour moi, c’est la plus belle définition de l’intelligence, pose Jean-Pierre Karaquillo, son responsable de formation au Centre de droit et d’économie du sport (CDES) de Limoges. Il a cette adaptabilité car il est à la fois humble et il a un regard sur les autres. Ça c’est très important. Il ne fonctionne pas par rapport à lui-même, mais par rapport à la manière dont il peut faire progresser les autres. Il est aussi très lucide. Il prend toujours en compte les éléments importants qui pourront le faire réussir. »
Ramos, Benzema… et Casemiro
En pratique, ça a donné cette saison un Real plus défensif, froid comme l’acier, avec 23 petits buts encaissés en 37 matchs et des victoires par un but d’écart à la pelle – de préférence grâce à un penalty de Sergio Ramos. Le capitaine madrilène, infranchissable, superbement insupportable et d’un sang froid létal (10 buts, premier défenseur à atteindre ce total depuis 15 ans), a réalisé une saison XXL. L’autre locomotive a été Karim Benzema, 21 buts (dont un doublé pour le titre) et 8 passes décisives. Le Français avait déjà sorti des saisons à ces hauteurs, mais à une époque où l’équipe, portée par CR7, marquait beaucoup plus. Impliqué sur plus de 40 % des 68 buts madrilènes, il a eu un impact énorme.
Entre ces deux hommes de base, l’ancien adjoint d’Ancelotti s’est appuyé sur un troisième joueur, à l’importance capitale : Casemiro. Le Brésilien, au cœur d’un milieu à quatre ou même parfois à cinq, a été, plus encore que Modric ou Kroos, la plaque tournante du collectif voulu par l’entraîneur. « Le positionnement de Casemiro a été une masterclass tactique de Zizou », disait le très rigoureux Massimiliano Allegri la semaine dernière dans Marca. Ce qui a impressionné l’ancien coach de la Juventus ? « La force qu’il a eue de rechercher l’équilibre indispensable dans une équipe si pleine de classe et de talent. » De quoi prouver qu’il est un vrai tacticien, au style peut-être inclassable mais toujours sur-mesure.
L’autre fait d’arme du Marseillais cette saison est la manière dont il a géré la reprise après la pause forcée due au coronavirus. Il restait 11 matchs quand, le 14 juin, les Madrilènes ont réattaqué contre Eibar. « Je veux qu’on les aborde comme onze finales », avait alors martelé Zidane. Résultat, le Real a remporté les dix premières. Pas si étonnant, pour un entraîneur qui peut se vanter de n’avoir jamais laissé passer un trophée en neuf finales dirigées (trois Ligue des champions, deux Coupes du monde des clubs, deux supercoupes d’Europe et une supercoupe d’Espagne). Mais toujours fascinant. « Il attire la confiance des autres, note Karaquillo. Les joueurs comprennent rapidement à qui ils ont affaire par rapport à l’état d’esprit. Et l’état d’esprit, c’est une question de posture. Lui il a la posture, les attitudes et les mots qu’il faut. »
Question de charisme?
Nous reviennent les mots de Marcelo quand Zidane avait pris tout le monde de court en annonçant son départ, en mai 2018. « Nous discutions tous les jours. Il s’intéressait à moi et me défendait, avait expliqué le Brésilien. C’était pour moi un très grand, un professionnel, pas seulement pour les titres. Il me défendait beaucoup et moi je donnais tout pour lui, je courais, je me battais, je jouais blessé. J’ai pratiquement donné ma vie pour Zidane. »
En plus d’avoir parfaitement géré la reprise physique de ses troupes, avec l’aide de l’ancien préparateur des Bleus Grégory Dupont, le double Z a su les conditionner pour une fin de saison en boulet de canon. « Ça s’appelle le charisme, coupe son ancien formateur. Il est un leader. On fait la distinction entre les différents types de leaders, celui du terrain, celui des vestiaires, etc. Non, il y a le leader, point. Le leader est celui qui a du charisme et qu’on a envie de suivre. »
Voilà donc le Real une nouvelle fois champion d’Espagne, et Zidane en train de regarder de tout là-haut ceux qui l’ont critiqué. Car les remarques n’ont pas manqué, sur ce Real gagne petit, illisible, chanceux, aidé par l’arbitrage vidéo. Pour ne rien vous cacher, on l’a pensé aussi, parfois. Mais le gagnant a toujours raison. « Il peut y avoir des commentaires en dehors, mais moi, je profite de ce que je fais chaque jour ici », balayait l’intéressé mercredi.
A ce propos, on ne peut que vous inciter à lire l’édito de notre confrère espagnol Ruben Jimenez dans Marca, mardi. Il y explique avec beaucoup d’humour comment les lecteurs adorent rouspéter contre les choix du Français… et comment ils n’apprennent jamais de leurs erreurs. « Critiquer Zidane, c’est s’acheter un billet pour la grande roue du ridicule. Mais même après tout ce temps, ils continuent de faire la queue pour acheter un autre ticket », écrit-il. On n’aurait pas dit mieux.
S/24M/Africsol
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