Le Camerounais a pris sa retraite le 6 septembre. Ce joueur à forte personnalité est considéré comme l’un des meilleurs footballeurs africains de l’histoire.

Dix mois après l’Ivoirien Didier Drogba, c’est un autre monument du football africain qui vient de mettre un terme à sa carrière. Le joueur camerounais Samuel Eto’o, après une dernière expérience au Qatar SC, a officialisé sa retraite en cette rentrée, à l’âge de 38 ans. Il aura ainsi évolué au niveau professionnel pendant vingt-deux ans, et remporté de nombreux titres, dont la Coupe d’Afrique des nations (CAN) en 2000 et 2002, et la Ligue des champions à trois reprises.

Enfant de la banlieue de Douala, la capitale économique camerounaise, Samuel Eto’o est devenu l’un des meilleurs attaquants de la planète dans les années 2000. Un destin remarquable pour celui dont le premier passage en Europe, en France plus précisément, alors qu’il avait 15 ans, s’était soldé par un retour précipité au Cameroun, faute de papiers en règle. Lorsqu’il reviendra sur le Vieux Continent, vingt-quatre mois plus tard, ce sera pour y effectuer la quasi-totalité de sa carrière.

Le Real Madrid lui a offert son premier contrat professionnel en 1997. Mais c’est à Majorque, (2000-2004) qu’il se fait un nom. Sa forte personnalité, son ego non moins affirmé et son indicible détermination l’aideront à devenir l’un des meilleurs buteurs d’Europe, puis du monde. « Je suis le meilleur en Afrique », se flatte le joueur dans une interview accordée à RFI lundi. « On ne devient pas un joueur de son niveau sans avoir confiance en soi. Eto’o est sans doute le Camerounais le plus connu dans le monde, il a vécu pendant des années avec une grosse pression autour de lui. Il faut se souvenir qu’il vient d’un milieu modeste et qu’il s’est beaucoup battu pour devenir un grand joueur », rappelle le Français Pierre Lechantre, qui fut son sélectionneur, notamment lors de la conquête de la CAN en 2000.

Déclarations sulfureuses

En juin 2004, le FC Barcelone n’hésite pas à débourser 24 millions d’euros pour l’acquérir. Avec Samuel Eto’o, les Blaugranes remportent notamment la Ligue des champions (2006 et 2009) et la Liga à trois reprises (2005, 2006 et 2009). Pendant cinq ans, le buteur améliore ses statistiques, en marquant 152 buts. En Catalogne, il côtoie Lionel Messi, Thierry Henry et Ronaldinho. Il expliquera quelques années plus tard que « c’est Messi qui a joué avec Eto’o, pas l’inverse ». Il se fait remarquer par d’autres déclarations sulfureuses, comme lors de son arrivée à Barcelone, affirmant qu’il « va courir comme un Noir pour vivre comme un Blanc ». Il n’épargne pas Ronaldinho, à qui il reproche un individualisme forcené, ni son entraîneur, Pep Guardiola. « Celui qui te fera gagner des titres, c’est Eto’o », lui dit-il.

Transféré à l’Inter de Milan en 2009 pour 40 millions d’euros, Samuel Eto’o gagne en 2010 la Ligue des champions, le championnat d’Italie et la Coupe du monde des clubs. Mais des relations parfois complexes avec l’entraîneur portugais José Mourinho, et une offre faramineuse du club russe d’Anji Makhatchkala – un salaire annuel de 20,5 millions d’euros – l’incitent à quitter l’Italie.

Après cette parenthèse rémunératrice, mais vierge de tout titre collectif, Samuel Eto’o signe à Chelsea, où il retrouve José Mourinho. Par la suite, le Camerounais connaîtra des expériences guère concluantes à Everton et à la Sampdoria de Gênes, avant de rebondir avec succès en Turquie, et notamment à Antalyaspor, où il fût même, pendant quelques semaines, entraîneur-joueur. C’est à Konyaspor que le buteur s’affichera une dernière fois en Europe, prélude à un ultime exil, au Qatar.

Meilleur buteur de l’histoire de la CAN

Si Samuel Eto’o a remporté quinze titres en clubs, il a également brillé avec sa sélection. Appelé pour la première fois par Claude Le Roy en 1997, il portera le maillot des Lions indomptables 118 fois, inscrivant 56 buts. Le joueur est devenu champion d’Afrique en 2000, puis champion olympique quelques mois plus, tard, à Sydney (Australie). A ce jour, Samuel Eto’o reste le meilleur buteur de l’histoire de la CAN. Le Camerounais a aussi disputé quatre phases finales de Coupe du monde (1998, 2002, 2010 et 2014), mais sans jamais franchir le premier tour. Ses succès ne doivent cependant pas faire oublier ses relations contrastées avec sa sélection nationale.

En 2011, il avait refusé de disputer un match amical en Algérie, pour protester contre le non-versement de certaines primes. La Fédération camerounaise de football lui avait alors infligé une suspension de quinze matchs, avant de réduire puis d’annuler la sanction. Plusieurs fois, le joueur évoquera les dirigeants du football camerounais en des termes peu élogieux. « Ils sont tous corrompus », dénonçait-il. Samuel Eto’o évoquera aussi des supposées menaces de mort pesant sur lui. « Pendant un temps, lors des rassemblements des Lions, il prenait ses repas seul, craignant d’être empoisonné », rapporte un ancien joueur, ce que l’intéressé confirmera.

Devenir entraîneur

Il se mettra définitivement en retrait de la sélection après la Coupe du monde 2014 au Brésil, symbolisée par un échec sportif (trois défaites) et de nombreuses tensions en interne. Mais il en est toujours resté proche, jouant notamment un rôle dans la nomination du Néerlandais Clarence Seedorf au poste de sélectionneur, en août 2018.

Samuel Eto’o, par ailleurs élu quatre fois meilleur joueur africain (2003, 2004, 2005 et 2010), ce qui lui fera dire, dans une interview accordée au Monde en 2014, qu’il appartenait « au groupe des grands joueurs », a connu quelques soucis d’ordre privé. Ses avocats avaient ainsi empêché la parution, en 2016, d’un livre écrit par Nathalie Koah. Cette jeune Camerounaise, qui avait entretenu une liaison avec l’attaquant, dressait un portrait très peu flatteur de la star.

Samuel Eto’o, qui s’est lancé avec plus ou moins de réussites dans les affaires (téléphonie, immobilier, montres de luxe), a créé en 2006 une fondation à son nom, où se mêlent actions caritatives et sportives. S’il profitera de son temps libre pour s’occuper de ces deux activités, le joueur ne devrait pas rester très éloigné du milieu du football, puisqu’il envisage de devenir entraîneur. Mais il a toujours exclu de faire de la politique, se contentant d’apporter son soutien officiel au chef de l’Etat camerounais Paul Biya, lors de la dernière élection présidentielle du 7 octobre 2018.

S/LMA/AFRICSOL

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