Deuxième procès pour les époux Fillon. Lourdement condamné en première instance, le couple va devoir s’expliquer en appel. L’ancien Premier ministre, un temps favori de la présidentielle de 2017, mais aujourd’hui disparu des radars de la politique, espère prouver son innocence.

Match retour pour le couple Fillon. François et Penelope ont rendez-vous ce lundi 15 novembre, et pour quinze jours, devant la Cour d’appel de Paris pour leur procès en appel. L’ancien champion de la droite, aujourd’hui reconverti dans les affaires, va-t-il réussir à inverser la vapeur d’un jugement accablant de première instance ? Condamné le 29 juin 2020 à 5 ans de prison dont deux ans ferme, 375 000 euros d’amende et dix ans d’inéligibilité, François Fillon a, selon le tribunal, « manqué à son devoir de probité ». À ses côtés, son épouse Penelope a été condamnée à trois ans de prison avec sursis, 375 000 euros d’amende et deux ans d’inéligibilité. L’avocat de l’ancien premier ministre, Me Antonin Lévy, espère auprès de l’AFP que « l’innocence » de François Fillon et de son épouse « seront enfin reconnues ». Mais pour obtenir un tel renversement, la défense du camp Fillon va-t-elle changer son dispositif catastrophique de première instance ?

Au cours du premier procès de l’hiver 2019, devant la juge Nathalie Gavarino, les époux Fillon, confrontés à la réalité du dossier judiciaire ne sont pas parvenus à convaincre de la réalité du travail de Penelope auprès de son mari comme assistante parlementaire. Selon les calculs du tribunal, le détournement se chiffre à 67 000 euros par an, soit 5 588 euros par mois, pour un préjudice total auprès de l’Assemblée de 1 054 094 euros.

« Ni le dossier, ni l’audience n’ont permis de mettre à jour des tâches effectuées par Mme Fillon »

Concernant le premier emploi d’assistante, à partir de 1998, le tribunal « a considéré que la contribution de Mme Fillon ne dépassait pas la simple transmission du courrier… Ses revenus étaient sans proportion avec son activité ». En 2002, quand François Fillon a ensuite cédé son fauteuil de député de la Sarthe à son suppléant Marc Joulaud, celui-ci a continué d’employer Penelope Fillon. Là encore, le tribunal a fait litière des versions des intéressés, comme « des pièces apportées par la défense ». Selon le jugement de première instance, « ni le dossier, ni l’audience n’ont permis de mettre à jour des tâches effectuées par Mme Fillon ». « Si elle transmettait le courrier, elle ne le traitait pas », ont estimé les juges, selon lesquels les époux Fillon, « savaient en signant ces contrats de collaborateur de député, qu’ils seraient dépourvus de toute consistance ». « Rien de concret n’a été démontré », cingle le jugement, estimant que « M. et Mme Fillon se sont rendus coupables de détournements de fonds publics, complicité et recel de ces délits ».

Même déclaration de culpabilité dans le deuxième volet de l’affaire, concernant l’embauche de Penelope Fillon à la Revue des deux mondes, propriété du milliardaire Marc Ladreit de Lacharrière. Penelope Fillon n’y a exercé, a estimé le tribunal, « aucune activité ». Considérant que cet emploi, qualifié « d’embauche de complaisance », a été « réclamé par François Fillon alors qu’il était encore Premier ministre », et ce « dans le but de leur apporter un complément de salaire après son départ de Matignon », les juges de première instance ont déclaré les époux Fillon coupables de complicité et recel de d’abus de biens sociaux pour un montant estimé à 135 000 euros.

Dans ce volet, les époux Fillon auront du mal à convaincre de la réalité du travail de Penelope auprès de la revue : son propriétaire a préféré plaider coupable ! Dans une reconnaissance de culpabilité signée avec le PNF, Marc Ladreit de Lacharrière a été condamné à 8 mois de prison avec sursis et 375 000 euros d’amende. Cet accord lui a évité un procès et une inscription de sa condamnation à son casier judiciaire, qui aurait pu le priver de sa grand-croix de la légion d’honneur, la plus haute distinction de l’ordre fondé par Napoléon…

RÈGLEMENT DE COMPTES POLITIQUE

Aujourd’hui disparu des radars de la politique, François Fillon, 67 ans, a été fauché en vol par ces affaires alors qu’il était sorti vainqueur de la primaire de la droite, et apparaissait comme le grand favori de la présidentielle de 2017. Bénéficiant jusque-là d’une réputation de probité et « d’honnêteté », jamais accroché par la justice en 35 ans de carrière, l’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy a toujours prétendu que les salaires versés à son épouse Penelope correspondaient à de réelles prestations. François Fillon a toujours assuré que ces emplois d’assistantes parlementaires, confiés à des proches, étaient une pratique très répandue à l’Assemblée. En coulisses, les proches de l’ancien champion de la droite ont toujours considéré que la révélation des fiches de paye de Penelope Fillon dans le Canard Enchaîné du 23 janvier 2017 procédait d’un « règlement de comptes politique venu de la droite elle-même »…

Une chose est sûre, la discrète Penelope Fillon, 66 ans, aux antipodes d’autres épouses de politiques, très impliquées et très visibles dans la carrière de leur mari, a semblé traverser le premier procès comme on traverse un cauchemar éveillé. Pas sûr que cette seconde audience soit une partie de plaisir…

S/M/Africsolprod

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