Le mouvement de grève se poursuivait massivement lundi dans les transports publics en France, en particulier à Paris, provoquant plus de 600 kilomètres de bouchons en Ile-de-France vers 08H30, à l'orée d'une semaine déterminante pour la réforme des retraites dont le contenu détaillé doit être présenté mercredi.

Métros et RER bondés, quais noirs de monde: les passagers se sont pressés dans les gares et stations au ralenti en région parisienne.

La SNCF a assuré lundi que le trafic était conforme à ses prévisions, soit un TGV et un Transilien (RER SNCF et trains de banlieue) sur cinq, trois liaisons TER sur dix (essentiellement assurées par bus), un train Intercités sur cinq et un trafic international "très perturbé".

Le trafic RATP était "extrêmement perturbé", avec neuf lignes de métro sur seize fermées lundi, et une circulation extrêmement réduite pour cinq autres. Sept des 25 "centres bus" de la RATP étaient bloqués par des grévistes, seul un tiers des bus circulant en conséquence contre la moitié prévue dimanche par la régie, a indiqué un porte-parole.

En conséquence, de nombreux usagers ont pris le volant: environ 400 km de bouchons s'accumulaient encore à 10H00 après un pic à 620 kilomètres autour de 08H30 sur les routes d'Ile-de-France, selon le site d'information routière Sytadin.

Mettant en garde contre "un risque de saturation sur les gares et sur les quais", la SNCF avait invité "tous ceux qui le peuvent à limiter leurs déplacements en train".

A la gare Lille Flandres, Christian Cogneaux, qui fait le trajet tous les jours entre Aulnoyes Aymeries et Paris, a vu tous ses trains supprimés. "On ne me laisse pas monter dans le train en me disant que je dois repayer un billet. Mais j'ai déjà un abonnement qui coûte 300 euros par mois (...) c'est énorme pour mon salaire et je n'ai pas les moyens de payer des billets en plus", a-t-il déploré, avant de devoir rentrer chez lui.

Pour faciliter les trajets des Franciliens, les véhicules accueillant trois personnes au moins étaient autorisés lundi à circuler sur les voies réservées aux bus et taxis en région parisienne, mais pas à Paris.

A Rouen, le marché d'intérêt national a été bloqué entre 06H00 et 09H00 par environ 150 militants CGT. "On va continuer toute la semaine des opérations de blocage économique et continuer le tour des entreprises pour renforcer la grève", a déclaré à l'AFP Gérald Le Corre, de la CGT 76.

 Début de polémique Delevoye -

Sous pression après un jeudi de mobilisation qui a jeté dans la rue plus de 800.000 manifestants, l'exécutif doit lever le voile sur une réforme des retraites encore floue.

Il défend un "système universel" par points censé remplacer à partir de 2025, ou un peu plus tard, les 42 régimes existants et être "plus juste", quand ses opposants redoutent une "précarisation" des pensionnés.

"Je suis rentré à la RATP pour le régime spécial, pas pour le plaisir de faire tchou tchou", réagissait lundi Rachid Baioui, 36 ans, conducteur de métro sur la ligne 9. A la station Mairie de Montreuil, plusieurs dizaines de conducteurs grévistes s'étaient rassemblés, huant leurs collègues non grévistes.

Lundi à 15H30, le haut-commissaire aux Retraites Jean-Paul Delevoye et la ministre des Solidarités Agnès Buzyn reçoivent les partenaires sociaux afin de "tirer les conclusions" de la concertation relancée en septembre. Puis le Premier ministre présentera, mercredi, "l'intégralité du projet" de réforme.

Dans ce contexte, le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez a trouvé "gênant" sur franceinfo que M. Delevoye n'ait pas déclaré sa fonction d'administrateur de l'Institut de formation de la profession de l'assurance (Ifpass) dans sa déclaration d'intérêts à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), comme l'a révélé Le Parisien lundi.

Une "erreur" et "une omission par oubli", a réagi M. Delevoye auprès du quotidien, reconnaissant que "ce n'est pas responsable".

Emmanuel Macron et Édouard Philippe, qui ont déjà consulté tout le week-end, doivent recevoir les ministres les plus concernés par la réforme et les dirigeants de la majorité à un dîner de "calage" mardi.

Ce plan porte "une ambition de sauvetage du système social français, et pas du tout de démantèlement comme cela a pu être caricaturé", affirme l'entourage du chef de l'État.

"On pourra apporter des réponses extrêmement positives pour beaucoup de gens qui subissent des injustices dans le système actuel: les femmes, les agriculteurs, et ceux qui ont des parcours hachés notamment", avait assuré dimanche Édouard Philippe.

"Nous tiendrons jusqu'au retrait" de la réforme, dans laquelle "il n'y a rien de bon", a toutefois prévenu le secrétaire général de la CGT Philippe Martinez. "Je ne négocierai pas la mise en œuvre de ce que je qualifie (de) monstre, (de) danger pour les retraites de demain", a abondé le numéro un de Force ouvrière, Yves Veyrier.

Le gouvernement devra en tout cas faire preuve de pédagogie pour répondre aux inquiétudes exprimées par de nombreuses professions appelées à se mobiliser à nouveau mardi. Parmi elles, les enseignants, qui craignent que leurs pensions baissent avec les nouvelles règles.

Les internes devraient en outre entrer dans la grève à partir de mardi, alors que la situation est hautement inflammable à l'hôpital.

S/AFP/AFRICSOL

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