Après près d'une décennie de présence au Mali, l'Armée française quitte le pays et laisse la place aux Forces armées maliennes. Un retrait hautement symbolique alors que les relations entre Paris et Bamako se sont dégradées ces derniers mois.

« Le dernier détachement de la force Barkhane présent sur le sol malien a franchi la frontière entre le Mali et le Niger. » Dans un communiqué publié ce lundi 15 août, l’état-major des Armées indique la fin d’une présence militaire française qui aura duré neuf ans. Les derniers militaires ont quitté la plateforme opérationnelle du désert de Gao.

Les soldats français passent ainsi le relais aux Forces armées maliennes, comme annoncé par Emmanuel Macron en février dernier. Après des menaces de retrait, confronté à des relations dégradées avec la junte au pouvoir, le président de la République, conjointement avec les partenaires européens et le Canada, avait franchi le pas. « Nous allons progressivement fermer, dans un exercice qui va prendre quatre à six mois, les bases qui sont présentes au Mali », prévoyait Emmanuel Macron. Il aura donc fallu six mois à l’Armée française pour organiser le départ des derniers soldats.

« La profonde transformation de l'opération Barkhane ne se réduit pas à la fin de sa présence sur le territoire malien, précise toutefois l’état-major, Dans une logique de coconstruction, les armées françaises continuent le combat contre le terrorisme au Sahel, en coordination avec nos partenaires africains et internationaux. »

NEUF ANS DE PRÉSENCE AU MALI FACE AUX DJIHADISTES

Décidée par François Hollande, l’opération Serval débute en janvier 2013 et vise à sécuriser le Sahel où pullulent des groupes djihadistes. Bamako est menacée par des islamistes radicaux, des succursales d’Al-Qaida et de l’État islamique. Un an auparavant, Aqmi s’était emparé de villes du nord du Mali, dont Kidal, Tombouctou et Gao. Les militaires français délogent les djihadistes des grandes villes en quelques semaines.

En 2014, Serval devient Barkhane et prend une ampleur régionale. Plus seulement circonscrite au Mali, elle s’étend à l’ensemble du Sahel. Entre 2015 et 2019, les attentats djihadistes sont nombreux et se multiplient. Les armées françaises éliminent alors plusieurs têtes des réseaux islamistes : Abdelmalek Droukdel, chef d’Aqmi, en juin 2020 et Bah Ag Moussa, chef militaire du Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans (GSIM) en novembre.

DES RELATIONS TENDUES AVEC BAMAKO

En 2020 et 2021, deux coups d’État militaires secouent le pays. Le premier renverse le président Ibrahim Boubacar Keïta. Le second met en place une junte militaire. Par décret, signé en mars dernier, celle-ci s’est engagée à rendre le pouvoir aux civils sous 24 mois, soit avant mars 2024. Paris et plusieurs puissances occidentales dénoncent en décembre 2021 le déploiement de mercenaires russes du groupe Wagner. Il y a quelques semaines, le général Michon, commandant français de la force Barkhane, estimait qu’ils étaient « un peu plus d’un millier d’hommes, déployés en six mois au fur et à mesure au centre du Mali et à l’est ». Des troupes qui se paieraient en exploitant les mines d’or du pays.

En déplacement en Guinée-Bissau fin juillet, Emmanuel Macron a invité les États ouest-africains à œuvrer pour que « le peuple malien puisse (...) exprimer sa souveraineté populaire » et « bâtir le cadre de stabilité » permettant de « lutter efficacement contre les groupes terroristes ». Des propos qui ont provoqué l’ire des militaires au pouvoir : « Le gouvernement de transition exige du président Macron d'abandonner définitivement sa posture néocoloniale, paternaliste et condescendante pour comprendre que nul ne peut aimer le Mali mieux que les Maliens ».

En neuf ans, 58 soldats français ont perdu la vie dans le cadre de l'opération Barkhane. 2 500 militaires devraient être maintenus au Sahel.

S/Marianne/Africsol

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