Début janvier, des militants écologistes de « Dernière Rénovation » ont aspergé Matignon de peinture pour dénoncer « l’inaction » face au dérèglement climatique. Trois semaines après, riverains et commerçants déplorent un dispositif de sécurité « disproportionné » qui les empêche de circuler librement, la rue de Varennes étant bloquée à la circulation.

« Non à la bunkérisation de Matignon ! » C’est autour de ce slogan que des riverains du 7e arrondissement se sont rassemblés pour dénoncer, à travers une pétition signée à plus de 1 000 reprises en quelques jours, leur quotidien « impossible » depuis plusieurs semaines. En cause : le dispositif de sécurité mis en place rue de Varennes après l’action de militants écologistes du collectif « Dernière Rénovation », qui avaient aspergé de peinture la porte de l’hôtel de Matignon pour dénoncer « l’inaction » du gouvernement face au dérèglement climatique, le 4 janvier dernier.

La portion comprise entre les rues du Bac et de Bellechasse, où se trouve donc le bureau de la Première ministre, est en effet bloquée à la circulation dans les deux sens. « Des personnes âgées sont contraintes de faire des détours pour passer… C’est une entrave à la liberté de circuler ! Tout ce dispositif pour l’action d’une bande de tocards… C’est complètement disproportionné », peste Bruno, signataire de la pétition, exaspéré de devoir dévier de son itinéraire habituel. Avant d’ajouter, pour « prévenir » toute critique : « Ce n’est pas un problème de riches ! Certes Bernard Arnault habite ici, mais il y a aussi des familles, des gens qui travaillent dans des bureaux, des petits commerçants et des touristes… Personne n’aimerait cela chez lui. »

SACS FOUILLÉS, RUE DÉSERTÉE…

 

Les forces de l’ordre, en nombre dans le secteur depuis l’action écologiste, filtrent les passants qui veulent traverser la rue. « Cela nous embête… pour le dire de façon édulcorée », confie une habitante du quartier, assurant qu’elle se fait parfois « fouiller son sac à main » par les agents avant de rentrer dans son studio. « Il y a beaucoup de membres des ministères ici… Donc c’est à la tête du passant », affirme une riveraine, ajoutant toutefois que certains policiers se révèlent « plus compréhensifs » que d’autres. « Je ne vous dirai rien sur le sujet. Mais bon… », glisse d’ailleurs l’un d’entre eux, lors de notre passage.

Les commerçants de la rue, déjà touchés par la hausse du coût de l’énergie, sont aussi affectés par la situation, à des niveaux divers. « Je ne le ressens pas tant que cela au niveau de la clientèle, mais esthétiquement, leurs barrières grises sont moches… Et ils me les mettent souvent sur la terrasse », regrette par exemple la gérante du restaurant Le Petit Varenne, situé juste après l’un des barrages. Mais pour les boutiques établies dans la partie centrale de la rue, les conséquences sont plus graves.

« Beaucoup de clients doivent faire le tour du quartier pour venir prendre leur café, donc ils ne viennent tout simplement pas. Le matin, on ne me laisse parfois même pas passer pour rejoindre ma boutique » explique l'un des gérants du torréfacteur La Brûlerie de Varenne. « On ressent clairement une baisse de fréquentation », constate le chef de la Boucherie Varenne, précisant que le barrage empêche les camions de livraison de se garer pour l’approvisionner. « L’autre jour, un client s’est même fait plaqué au sol, car il n’avait pas sa carte d’identité et qu’il a un peu répondu aux agents » relève également le commerçant.

RACHIDA DATI S’EN MÊLE

Ayant pris connaissance des revendications du collectif de riverains avant de le recevoir ce vendredi 27 janvier, la maire LR du 7e arrondissement de Paris, Rachida Dati, a d’ores et déjà adressé une lettre à Élisabeth Borne« Les véhicules […] sont contraints de réaliser de nombreuses manœuvres, notamment des marches arrières, lorsqu’ils se voient refuser l’accès à cette voie. La sécurité des piétons, et notamment des enfants qui empruntent cet itinéraire, est donc directement menacée », développe-t-elle.

L'ancienne garde des Sceaux souligne également qu’un tel dispositif n’a pas été mis en place devant le ministère de la Transition écologique et celui de l'Économie et des Finances, pourtant visés par des actions similaires. En attendant une réaction des pouvoirs publics, le collectif de riverains se réserve de « solliciter la préfecture de police de Paris » si rien ne venait à changer.

 

S/MARIANE/Africsol

Commentaires