« L’élection présidentielle du 22 février 2020 s’est conclue très clairement par la nette victoire de M. Agbéyomé Kodjo », a lancé Sébastien Nadot le 2 février dernier devant ses confrères de la Commission des Affaires étrangères de l’hémicycle français. Le député de la Haute-Garonne a interpellé par la même occasion le Chef de la diplomatie française Jean-Yves Le Drian et l’a invité à reconsidérer la position de la France sur la situation politique au Togo.
Cet élu français qui avait appelé à la création d’une commission d’enquête parlementaire sur la vente d’armes françaises aux acteurs du conflit au Yemen a préparé une véritable missive. Maîtrisant le dossier togolais avec une certaine aisance, Sébastien Nadot a évoqué dans les moindres détails le tripatouillage des résultats et le « hold-up » électoral orchestré par le régime togolais qui avait scandalisé les chancelleries occidentales.
« L’élection d’Agbéyomé Kodjo a été saluée par les formations politiques et les organisations de la société civile tant le résultat du scrutin était clair. Pourtant, contre l’évidence des résultats donnés par la compilation des procès-verbaux des bureaux de vote, la Commission électorale nationale indépendante (CENI), qui n’a d’indépendante que le nom, a proclamé en 24 heures et sans la certification des représentants des candidats, c’est-à-dire en violation du code électoral, la réélection de M. Faure Gnassingbé à plus de 70 % des suffrages », explique-t-il.
« Celui-ci entame ainsi son 4ème mandat dans un totalitarisme pire que celui de son père qui a tenu les rênes du Togo pendant 38 ans. La famille Gnassingbé règne sur le Togo depuis plus d’un demi-siècle. Point de démocratie sans alternance : le Togo n’est pas une démocratie », dénonce-t-il.
« Le soir même du scrutin, révèle-t-il, les domiciles de M. Agbéyomé Kodjo et de Mgr Philippe Fanoko Kpodzro, archevêque métropolitain émérite de Lomé et défenseur de la démocratie, ont été encerclés par les forces de sécurité du régime. Plusieurs fois emprisonné arbitrairement, M. Kodjo, légitimement élu par le peuple togolais, a été arrêté du 21 au 24 avril 2020 pour se voir interdire de parler de sa victoire. Une médiation à la demande du régime sortant de M. Gnassingbé a été initiée par Mgr Nicodème Barrigah, actuel archevêque métropolitain de Lomé, pour un partage des pouvoirs. Agbéyomé Kodjo, refusant cet arrangement de gré à gré qui méprise l’expression du suffrage populaire, risque désormais pour sa vie et vit depuis dans la clandestinité. »
Le député de la Haute-Garonne a également attiré l’attention des membres de la Commission des affaires étrangères sur la sécurité de l’ancien Premier ministre togolais Agbéyomé Kodjo contraint en exil et sa famille. « Son épouse, insiste-t-il, Mme Alfreda Amorin-Kodjo, et sa fille, Mme Eyram Israella Kodjo, toutes les deux de nationalité française, ont également été plusieurs fois prises à partie par les forces du régime, sans bénéficier de la protection du consulat français. Il lui demande quelles sont les actions que la France compte urgemment mener afin d’assurer la sûreté de M. Kodjo et sa famille de nationalité française et d’accompagner les combats du peuple togolais pour la démocratie, dans un pays où les droits de l’Homme sont sans cesse bafoués : la presse est malmenée, les leaders politiques et les responsables syndicaux sont enlevés et jetés arbitrairement en prison ; malgré les apparences le pays connaît de fortes tensions et fonctionne au ralenti », conclut-il.
L’écho retentissant de la question du député Sébastien Nadot, membre de la majorité présidentielle, pourrait changer la donne. Il n’est pas exclu qu’une mission parlementaire soit conduite par des membres de la Commission des affaires étrangères au Togo. En attendant, du côté de Lomé, le pouvoir prête une oreille attentive à la quintessence de la réponse que pourrait donner le Chef de la diplomatie française.
Affaire à suivre...
S/AJ/AFRICSOL
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