Après la diffusion, le 21 avril dans « Valeurs actuelles », d’une tribune controversée où des militaires appellent à « soutenir les politiques » qui œuvreront à la « sauvegarde la nation », Florence Parly exige que des sanctions soient prises contre les concernés.

La Grande Muette ne l'est plus tellement. Alors que la tribune controversée de militaires parue le 21 avril dans Valeurs actuelles a été largement condamnée par le monde politique, Florence Parly a pris la parole pour, à son tour, vilipender les propos des signataires. Après s'être exprimée la veille dans une série de tweets, lundi 26 avril, sur France Info, la ministre des Armées a d’abord déclaré que cette tribune l’avait fait « bondir ».

Ces mots « appellent à une sorte d'insurrection, du moins, attisent un climat de division », considère-t-elle, demandant des sanctions fermes, pour ceux « qui ont enfreint le devoir de réserve » et pour « les militaires actifs ».

UNE TRIBUNE APOCALYPTIQUE

Pour autant, la ministre a tenu à prévenir tout amalgame qui viserait l’Armée. Et de rappeler que « les militaires sont des personnalités qui ont choisi d'abord et avant toute chose le service de la Nation et le service de leurs concitoyens ». Ce texte est, a-t-elle déclaré, « une insulte qui est jetée à la figure de milliers de militaires ».

Dans ladite tribune, les signataires mettent notamment en exergue un « délitement » supposé de la société, les actes délictueux des « hordes de banlieue », « le détachement de multiples parcelles de la nation » mais aussi la mission future qui sera celle des militaires, à savoir la « protection de nos valeurs civilisationnelles et de sauvegarde de nos compatriotes sur le territoire national », en cas d’« explosion ».

DES CONDAMNATIONS IMMÉDIATES

Ces propos ont entraîné, dans les jours qui suivent, des critiques très fortes au sein de plusieurs partis, notamment ceux de gauche. La ministre déléguée chargée de l'Industrie, Agnès Pannier-Runacher, a comparé les militaires à « un quarteron de généraux en charentaises qui appellent au soulèvement ». Jean-Luc Mélenchon a pointé du doigt des « militaires factieux » encouragés par « le journal Valeurs actuelles qui semble s'être donné pour mission d'appeler à une insurrection ». Cette « tribune de vieux réacs galonnés », selon Nathalie Artaud, est « suffisamment ambiguë pour que plane la menace séditieuse », ajoute Olivier Faure.

En conséquence, la France insoumise a saisi le procureur de la République, au titre de l’article 40 du Code de procédure pénale. Celui-ci prévoit que « toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République ».

L’EXTRÊME DROITE S’EMBOURBE

Le député européen Rassemblement national Thierry Mariani a défendu les signataires sur son compte Twitter, tout en commettant une erreur de taille puisque les militaires à la retraite sont toujours soumis à leur devoir de réserve, contrairement à ce qu’il écrit. Exemple : un général à la retraite qui avait participé (et appelé à faire de même) à une manifestation contre les migrants à Calais avait été radié de l’Armée pour manquement à son obligation de réserve, au titre de l’article L.4137-2  du Code de la défense. Une sanction inadmissible pour l’intéressé. Le 22 septembre 2017, le Conseil d’État avait pourtant rejeté sa requête, en estimant que la mesure disciplinaire « n’était pas disproportionnée ».

Enfin, Marine Le Pen s’est trouvée passablement isolée, non seulement à soutenant les militaires mais en les enjoignant à la rejoindre, dans une tribune diffusée dans le même média, quelques jours plus tard. Forte de sa popularité électorale grandissante parmi les militaires, la présidente du Rassemblement national ne pouvait manquer pareille occasion. Une prise de position à laquelle Florence Parly n’a pas manqué de réagir, une fois encore : « Les mots de Madame Le Pen reflètent une méconnaissance grave de l'institution militaire, inquiétant pour quelqu'un qui veut devenir cheffe des armées. »

S/M/Africsol

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