Le chef de l’Etat, qui maintient le doute sur ses intentions pour la présidentielle de 2020, a appelé lundi à « transférer le pouvoir à une nouvelle génération ».
 

Le nouveau « parti unifié » du Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) a été lancé, lundi 16 juillet, en Côte d’Ivoire, avec à sa tête le chef de l’Etat ivoirien, Alassane Ouattara, à deux ans de la prochaine élection présidentielle.

« L’assemblée générale constitutive » du nouveau mouvement s’est tenue dans l’après-midi dans un grand hôtel d’Abidjan. Les délégués de plusieurs partis politiques et des personnalités favorables au nouveau parti unifié en ont adopté « à l’unanimité » les statuts après une heure de débat, et désigné sans surprise comme leader M. Ouattara, qui était le seul candidat déclaré, selon un communiqué.

Dans une deuxième étape, un « congrès constitutif » entérinera la création du RHDP d’ici à la fin de l’année, selon un responsable.

Le PDCI mécontent

Lancé une semaine après un remaniement ministériel, le RHDP regroupe le Rassemblement des Républicains (RDR), la formation du président Ouattara, l’Union pour la démocratie et la paix en Côte d’Ivoire (UDPCI – six députés), présidée par Albert Toikeusse Mabri, et des personnalités d’autres partis.

Le Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), l’un des deux grands partis de la coalition au pouvoir, a refusé de se joindre au RHDP, mécontent des termes de l’alliance proposée. Il exigeait comme préalable à l’union qu’une personnalité issue de ses rangs soit le candidat unique du RHDP à la prochaine présidentielle. Ce que le RDR a refusé, bien que le PDCI ait soutenu M. Ouattara aux précédents scrutins présidentiels de 2010 et 2015.

Cependant plusieurs élus et cadres du PDCI ont choisi d’adhérer au RHDP. Une douzaine d’entre eux ont été nommés ministres dans le nouveau cabinet.

Dans son discours devant les militants du nouveau RHDP, le président Ouattara a lancé un appel au président du PDCI, Henri Konan Bédié.

« Il faut que nous restions ensemble (…) c’est que je vais dire à mon aîné », a déclaré M. Ouattara, rappelant les victoires passées obtenues grâce à l’union avec le parti de l’ancien président, en particulier pendant les heures sombres de la crise post-électorale de 2010-2011, qui avait conclu la décennie de crise politico-militaire des années 2000.

« Moi je veux le rassemblement. Il faut poursuivre les discussions entre les deux présidents [Bédié et Ouattara]. On ne veut pas retomber dans la violence », a expliqué à l’AFP Guy Kanga, secrétaire d’une section PDCI à Bouaké – la deuxième ville ivoirienne – présent à l’assemblée générale.

Situation confuse

Des personnalités se revendiquant de trois autres petits partis politiques ont également rejoint le RHDP : l’Union pour la Côte d’Ivoire (UPCI, 3 députés), le Mouvement des forces d’avenir (MFA) et le Parti ivoirien des travailleurs (PIT).

La situation est confuse pour ces trois petits partis. Leurs congrès se sont prononcés contre l’union avec le RHDP, mais des dissidences sont apparues ensuite, avec des tentatives de putsch en interne, qui font l’objet de procédures en justice. Certains de ces « dissidents » ont été nommés au nouveau gouvernement.

« Il est difficile de parler de grand parti unifié, puisque le RDR se retrouve avec des partis satellites ne représentant que quelques pourcents de l’électorat », commente le politologue Sylvain N’Guessan, directeur de l’institut de stratégie d’Abidjan. « Ce n’est pas ce dont rêvait le président Ouattara. Il a attiré des décideurs du PDCI, mais la base de ce parti reste réfractaire. »

Le RHDP « crée une confusion dans l’arène politique ivoirienne. Peut-il exister sans le PDCI ? », estime Pierre Dagbo Gode, professeur de sciences politiques à l’Université Félix Houphouët-Boigny d’Abidjan. « Dans ces conditions, personne ne pourra gagner l’élection présidentielle au premier tour » en 2020.

Evoquant ce scrutin, le président Ouattara a martelé : « Nous allons gagner » avec le RHDP. Mais il a ensuite parlé de sa succession au terme de son deuxième mandat.

« Nous devons travailler, le président Bédié et moi, pour transférer le pouvoir à une nouvelle génération en 2020 », a déclaré M. Ouattara, suscitant un tonnerre d’applaudissements dans l’assistance.

M. Ouattara, 76 ans, avait laissé planer le doute sur son intention de se représenter en 2020 pour un troisième mandat, en principe défendu par la Constitution de 2016 qui n’en autorise que deux. Mais la rédaction de cette constitution laisse cependant un flou juridique sur la question.

M. Ouattara avait déclaré la semaine dernière qu’il indiquerait son intention précise lors de son allocution à la Nation le 6 août, la veille de la fête de l’indépendance.
 
S/LemondeAfrique/AFRICSOL

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