La cyberbrutalité s’installe. Le temps d’élections ou de révoltes, des pays africains s’obscurcissent sur la carte globale du Web, disparaissant même quelques jours ou semaines. La coupure des télécommunications en période électorale fait désormais partie de l’arsenal des régimes africains qui craignent l’insurrection populaire. Comme ils quadrillent les quartiers sensibles acquis à l’opposition, ils verrouillent les territoires numériques.

Cette fois, c’est le tour de la République démocratique du Congo(RDC), où près de 4 % des 90 millions d’habitants ont, en temps normal, accès à Internet. Aucune perturbation n’a été signalée le jour du vote, dimanche 30 décembre – un scrutin présidentiel et provincial qui s’est déroulé avec deux ans et une semaine de retard. Mais le lendemain, en fin de matinée, Internet et les SMS ont été suspendus. Une manière, selon des conseillers du président sortant, Joseph Kabila, de réduire la folle machine à rumeurs et à « fake news », mais aussi la diffusion de résultats avant leur proclamation officielle ou de redoutées preuves de fraudes. Une mesure également éprouvée pour bloquer la coordination de manifestations ou couper court aux desseins insurrectionnels échafaudés sur les réseaux sociaux, terrain prisé des militants.

Trafiquants de télécoms

Qu’importe si cela retarde le comptage des bulletins de vote par la commission électorale – comme le confie son président, Corneille Nangaa – et met à mal la remontée d’informations par les dizaines de milliers d’observateurs de la société civile, de l’Eglise catholique et des organisations régionales accréditées. « On ne peut pas permettre à ceux qui veulent provoquer le chaos d’agir », dit un conseiller du chef de l’Etat. Ce dernier se montre d’ailleurs indifférent au message de plusieurs diplomates occidentaux exhortant le pouvoir congolais à « ne pas bloquer les moyens de communication ».

S/LEMONDEAFRIQUE/AFRICSOL

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