Deux mois après le début de la guerre en Ukraine, la parution de la traduction du rapport annuel de la CIA en France tombe à pic. L’ouvrage « Les Nouvelles Menaces sur notre monde vues par la CIA », (Éd. Équateurs, 2022) livre des prévisions sur les ambitions de Moscou en Ukraine et dans le monde en 2022.

Et si c’était (encore) vrai ? La traduction du rapport annuel de la CIA (Les Nouvelles Menaces sur notre monde vues par la CIA , Éditions des Équateurs), publiée le 21 avril, dresse un panorama préoccupant des menaces qui pèsent sur les États-Unis et ses alliés occidentaux en 2022 et dans les années à venir. Première d’entre elles : la Russie. Des prévisions d’autant plus intéressantes que le renseignement américain était le premier à prédire une invasion russe en Ukraine laissant les Européens circonspects. Marianne s’est plongé dans l’ouvrage pour en savoir plus.

POUTINE DÉSTABILISÉ

Dans Les Nouvelles Menaces sur notre monde vues par la CIA, le directeur de la CIA, William Burns estime que le président russe a été surpris, en Ukraine, par quatre éléments majeurs. Il s’est tout d'abord trompé sur la capacité de résistance de l’Ukraine, qu’il pensait plus « faible et intimidable ». Ensuite, les contextes politiques en Europe – et en particulier en France, avec l’élection présidentielle, et en Allemagne avec la passation de pouvoir – n’ont pas été favorables à la prise de risques. Vladimir Poutine pensait par ailleurs « avoir mis son économie à l’abri des sanctions, en créant un important trésor de guerre en devises étrangères » explique William Burns. Enfin, le dirigeant russe était convaincu d’avoir suffisamment « modernisé ses forces armées et donc d’être capable de remporter une victoire rapide et décisive à un coût moindre ».

Mais si la guerre ne s’est, pour l’instant, pas déroulée comme l’envisageait Vladimir Poutine, il ne compte pas diminuer ses efforts selon William Burns : « Poutine est déterminé à dominer et à contrôler l’Ukraine, à façonner son avenir. (…) Il baigne dans un mélange inflammable de ressentiment et d’ambition depuis de nombreuses années. Cette conviction personnelle compte plus que jamais dans le système russe. »

Pour autant, la CIA considère que le « plan maximaliste »  de Poutine, c’est-à-dire l’utilisation maximale des forces militaires disponibles, visant à « capturer la totalité ou la majeure partie de l’Ukraine et mettre en place un régime pro-russe », est difficilement envisageable en l’état actuel. Selon Avril Haines, directrice du renseignement national américain, cela nécessiterait « davantage de ressources » or, l’armée russe a déjà « commencé à assouplir ses règles d’engagement pour atteindre ses objectifs militaires ». Des conscrits ont en effet été envoyés au front très vite après le début de l'offensive russe alors même que Poutine avait promis qu'il ne les mobiliserait pas.

Comme l'écrivait Marianne au début du mois, tous les jeunes russes de 18 à 27 ans sont appelés à effectuer un an de service militaire, sauf dérogation. Et si la loi russe leur permet de s'engager au bout de trois mois de service militaire, la pratique fait que « des pressions plus ou moins fortes sont exercées sur les conscrits afin qu'ils signent un contrat avec l'armée » écrivait Anna Colin Lebedev, maîtresse de conférences et spécialiste des sociétés post-soviétiques. Résultat : de très jeunes soldats souvent inexpérimentés se retrouvent au combat. Poutine semble donc être au maximum de ses capacités.

PAS DE « CONFLIT DIRECT » AVEC LES ÉTATS-UNIS

 

Le chef du Kremlin n’aurait pas l’intention de s’engager dans « un conflit direct avec les forces américaines » selon les estimations de la CIA. La Russie cherche plutôt à trouver un arrangement avec les États-Unis « sur la non-ingérence mutuelle dans les affaires intérieures des deux pays et la reconnaissance par les États-Unis de la sphère d’influence revendiquée par la Russie sur une grande partie de l’ex-Union soviétique ».

Autre élément majeur du rapport, le renseignement américain estime que Moscou va continuer, dans les mois et années à venir, à « étendre son empreinte militaire, de renseignement, de sécurité commerciale et énergétique mondiale ». Ses implantations à l'étranger au Moyen-Orient, en Afrique du Nord, au Vénézuela ou encore dans les anciennes républiques soviétiques, lui permettent d'obtenir des droits d’accès militaires et des opportunités économiques.

Selon le Lieutenant-général Scott Berrier dans le rapport de la CIA, le développement de son arsenal militaire et son influence à l'étranger lui permettent de conserver un « avantage asymétrique » face aux Occidentaux et maximiser ses capacités de dissuasion.

Vladimir Poutine va en effet poursuivre sa modernisation militaire grâce à de nouvelles armes nucléaires très menaçantes pour les Occidentaux. Parmi elles, les armes nucléaires tactiques qui ont la capacité de cibler des zones très précises ou encore « des missiles hypersoniques très puissants qui n'ont pas d'équivalents chez les Occidentaux » comme l'expliquait àMarianne le spécialiste des flottes de combat, Alexandre Sheldon-Duplaix, le mercredi 20 avril dernier. Pas très rassurant...(suite mariane)

S/Mariane/Africsol

Commentaires